Nuxe choisit Tmall pour se lancer en Chine

Julie Bonnet Nuxe

Présente dans 83 pays, Nuxe considérait « comme une évidence » d’être en Chine. C’est chose faite depuis mai 2017. Julie Bonnet, Chief Digital Officer chez Nuxe, a expliqué lors d’un Morning de China Connect comment la marque française a utilisé le e-commerce – principalement la plate-forme Tmall Global du groupe Alibaba – pour faire connaître la marque et tester le marché chinois.

Permettant aux marques étrangères de vendre en Chine sans les coûts ni les contraintes administratives d’une implantation physique, le e-commerce BtoC transfrontalier ou « cross border » a connu une très forte croissance ces dernières années en Chine qui devrait compter 74 millions de cross border shoppers en 2018, selon iiMediaresearch. Encouragée par les autorités chinoises qui y voient un moyen de stimuler la consommation domestique au détriment des achats des touristes chinois à l’étranger, la démarche est toutefois très encadrée.

Alibaba impose par exemple aux marques de recourir à un TP ou « Tmall Partner » basé en Chine pour faire le lien avec la plate-forme. Nuxe s’est ainsi rapprochée de NextBeauty, une société fondée par le français Grégoire Grandchamp constituée d’une équipe chinoise comptant des anciens de L’Oréal Chine et d’Alibaba. « Il ne faut pas croire que les plates-formes vont faire le travail pour les marques, » prévient-il. « Notre rôle est de comprendre comment travailler avec elles et d’élaborer une stratégie sales and marketing pour les faire réussir sur Tmall. » Pour maximiser l’exposition aux internautes chinois, le TP incite les marques à tirer parti du calendrier Tmall jalonné de 6 événements promotionnels majeurs, au premier rang desquels la journée des célibataires, le 11 novembre ou « 11.11 », opération de shopping en ligne de 24h instaurée en 2009 par Alibaba.

Préparation en amont du 11.11

En 2017, le géant chinois a annoncé un record de ventes – 25,3 milliards de US$, en croissance de 39% par rapport à 2016, réalisées à 90 % sur Internet mobile – mais revendique également une autre réussite : une montée en gamme et une image nettement améliorée par rapport à la foire aux rabais de ses débuts. Parmi les innovations, la plate-forme Tmall a ouvert cette année un Luxury Pavillon dédié aux marques de luxe, où Guerlain a pu vendre un parfum au prix de 500.000 yuans (65.000 €).

Les marques de cosmétiques n’ont pas lésiné sur les moyens. Lancôme a invité six stars chinoises pour représenter ses produits avec des angles différents. SKII a conçu une édition limitée présentée de façon joyeuse et ludique. MAC a fait défiler 200 mannequins lors du défilé « See Now Buy Now » organisé par Tmall. Estée Lauder, L’Oréal et Shisheido ont installé des pop-up stores le temps de l’événement…

« Il y a une évolution certaine du 11.11 qui intègre de nouveaux codes tels que la premiumisation, la personnalisation, le gaming et l’entertainment », résume Julie Bonnet. « Le 11.11 n’est plus simplement un événement promotionnel, c’est un vrai rendez-vous pour les marques, qui nous permet aujourd’hui d’allier branding et business. »

Julie Bonnet – Chief Digital Officer Nuxe

Nuxe a choisi de mettre en avant trois gammes de produits – l’Huile prodigieuse, Rêve de miel et la Crème fraîche de beauté. « La clé, c’est la préparation », insiste Grégoire Grandchamp, qui préconise de commencer à planifier pour le 11.11 six mois à l’avance. La stratégie de Nuxe a beaucoup misé sur les influenceurs en faisant appel à un KOL (Key Opinion Leader) d’envergure nationale spécialisé dans les cosmétiques, Wu Miao (吴淼), ainsi qu’à quatre personnalités de rayonnement régional autour de Pékin, Canton, Chengdu et Shanghai, « avec l’objectif de toucher 2 millions de followers. »

Laisser les influenceurs s’approprier la marque

« Les influenceurs dans la beauté aujourd’hui, c’est miraculeux », affirme Grégoire Grandchamp. « Même des marques à l’origine peu connues en Chine telles que Leonor Greyl, avec laquelle nous travaillons, est en train de connaître un développement assez extraordinaire grâce à quelques KOLs. » Il insiste toutefois sur la nécessité de s’assurer que les influenceurs sélectionnés connaissent bien la marque et aiment les produits, « parce qu’un bon influenceur c’est quelqu’un qui a un rapport personnel et authentique avec la marque, qui est un vrai fan. Il est important aussi d’être en relation sur le long terme avec eux pour éviter le problème des fake followers. »

Pour Julie Bonnet, les influenceurs représentent même « le premier média en Chine ». « Mais il y a une dimension essentielle à intégrer, surtout pour nous marques françaises, c’est de leur laisser la liberté si on veut que ça marche en Chine. Il faut laisser les KOLs s’approprier la marque. »

Le bilan du 11.11 a été « conforme aux attentes chez Nuxe, avec 50 % du volume de ventes de cette première année qui est courte. » Le résultat est plutôt 35 % à 40 % sur une année normale pour une marque, indique Grégoire Grandchamp, qui assure que NextBeauty propose un partenariat de long terme équilibré entre le chiffre d’affaires et la construction de la marque. « Nous offrons aux marques un accès en anglais aux datas de Alibaba, pour leur permettre de mieux cibler leur clientèle en termes de profil et de mode d’achat », précise-t-il, en ajoutant qu’outre Tmall, NextBeauty travaille régulièrement avec six ou sept plates-formes.

Pour tenter le e-commerce cross border, les marques n’ont en effet pas l’obligation de passer par Tmall. D’autres plates-formes existent, telles que JD.com, qui a réalisé cette année des ventes de 19,2 milliards de US$ lors du 11.11 (en hausse de 50 % par rapport à 2016), Xiaohongshu.com ou encore le leader Kaola.com (du groupe chinois NetEase), moins connu en Europe. « Il y un paysage qui devient plus hétérogène, plus prolifique et plus complexe », analyse Laure de Carayon, l’organisatrice de China Connect. « Ce sont autant d’opportunités pour qui veut bien se donner les moyens de creuser. »

 

Cet article a été commandé et publié par Premium Beauty News