La ville réussit à passer entre les gouttes du China bashing qui sévit dans les médias et les réseaux sociaux anglo-saxons (Twitter en tête). Lonely Planet l’a désignée comme « la ville chinoise la plus innovante. »
Shenzhen (深圳市) est la 2e ville à visiter au monde en 2019, selon Lonely Planet. Le guide de voyages australien publie chaque année son Top 10 de pays, villes et régions à visiter. La dernière fois qu’une ville chinoise avait été sélectionnée remonte à cinq ans, avec Shanghai classée 6e dans le Best in Travel 2014.
Tout arbitraire ou controversé qu’il puisse paraître, ce classement est souvent lié à l’actualité. Par exemple, les raisons évoquées par Lonely Planet pour expliquer la présence de l’Allemagne à la 2e position des pays à visiter en 2019 sont deux événements prévus l’an prochain : le 30e anniversaire de la chute du mur de Berlin et le centenaire de la création du mouvement artistique Bauhaus.
Shenzhen est située dans le Guangdong, une province méridionale qui fait parler beaucoup d’elle ces derniers temps. Une ligne de train à grande vitesse vient d’être terminée, rapprochant Hong Kong de Shenzhen (20 mn de trajet). Et le pont géant Hong Kong-Zhuhai-Macau (港珠澳大桥) est une autre initiative de Pékin pour relier Hong Kong au continent chinois qui fait couler beaucoup d’encre du côté des médias occidentaux.
Design City
De son côté, Lonely Planet souligne que Shenzhen a inauguré ces trois dernières années le Design Society, en coopération avec le V&A museum de Londres, le Museum of Contemporary Art & Planning Exhibition (photo ci-dessus © Cathy Adams / Lonely Planet), ainsi que le village d’art patrimonial OCT-LOFT.
Conçu par l’architecte japonais Fumihiko Maki, lauréat du prix Pritzker, le Design Society (设计互联) est un building abritant des galeries d’art et des ateliers d’artistes, ainsi qu’une boutique d’objets de décoration et un café. Sur son site internet bilingue, il est expliqué que « Design Society est pluriel. Son identité se situe dans sa capacité à combiner, connecter, inter-fertiliser et, ainsi, transcender les territoires culturels et les frontières tels que nous les connaissons. »
Les médias occidentaux sont nombreux à s’intéresser à Shenzhen. « BIG, Foster + Partners, Kohn Pederson Fox… Shenzhen est, depuis quelques années, devenu l’un des terrains de jeu favoris des plus grands cabinets d’architecte », affirme le site en ligne The Good Life, qui indique que « récemment, c’est la firme londonienne Rogers Stirk Harbour + Partners qui a remporté un chantier d’envergure pour transformer le quartier de Qianhai, une zone en pleine mutation. »
Modèle d’urbanisme
Sixth Tone, site d’information chinois (détenu par Shanghai United Media Group) de langue anglaise destiné à un lectorat occidental, a consacré une série d’articles à la manière dont Shenzhen gère son développement et sa gentrification galopante. La préservation des villages urbains est une piste privilégiée par Meng Yan, curateur de l’édition 2018 de la Shenzhen-Hong Kong Bi-City Biennale of UrbanismArchitecture, selon lequel « l’organisation organique et la diversité sont ce qui manque à beaucoup de villes modernes à l’heure actuelle. » Cette année, avec la tenue de la biennale dans les villages urbains pour la première fois, les curateurs espèrent pouvoir examiner comment des personnes d’origines et de classes sociales différentes peuvent coexister dans la ville et comment diversifier les communautés au cours du processus d’urbanisation.
« Le Delta de la rivière des perles, en particulier la ville de Shenzhen dans le sud de la Chine, pourrait constituer un modèle pour les futurs projets de design urbain », écrit dans un autre article de Sixth Tone Jason Hilgefort, academic director de FUTURE +, une académie d’urbanisme, de paysage et d’art urbain à Shenzhen. « À l’exception de Hong Kong, la métropole florissante, la région du delta avoisinante est passée de quelques 200 villages de pêcheurs abritant une population d’environ 200 000 habitants à une banale métropole d’environ 20 millions d’habitants, le tout en seulement deux générations.
Aujourd’hui, cependant, Shenzhen tente de se débarrasser de sa réputation d’usine du monde et de devenir une ville de design. Ce faisant, elle est devenue un nouveau hub urbain chinois, qui maintient sa production industrielle tout en débordant d’innovations, bénéficiant des connections établies entre les pôles industriels et créatifs. »