Le problème avec les publicités des marques chinoises dans The Economist

Xiaomi China Brand

L’universitaire chinois He Jiaxun estime dans un éditorial du CGTN que les marques chinoises à ambition internationale devraient véhiculer plus de valeurs, notamment en utilisant des symboles de la culture chinoise.

« Une construction de marque réussie peut contribuer à la croissance du soft power du pays. » Un éditorial publié par CGTN,- la chaîne chinoise d’informations internationales de langue anglaise, appartenant à China Central Television (CCTV), basée à Pékin -, se concentre spécifiquement sur les marques chinoises.

Fait intéressant, son auteur, He Jiaxun (何佳讯), directeur de l’Institute for Nation(al) Branding Strategy au sein de la East China Normal University et en même temps doyen chinois de la Asia-Europe Business School, est assez critique. « Beaucoup [de grands groupes chinois] sont toujours coincés vers le bas de la chaîne de valeur, désespérant de grimper le prochain échelon. C’est parce qu’ils ont encore à intégrer des notions de valeurs dans leurs efforts de construction de marques. »

Absence de liens émotionnels

He Jiaxun pointe du doigt des marques comme Huawei, China Southern Airlines, China Construction Bank et le groupe immobilier Dalian Wanda, qui ont diffusé des publicités dans le magazine The Economist au cours des cinq dernières années. « Le problème avec ces publicités, c’est qu’elles ont uniquement parlé des propriétés fonctionnelles de produits et services spécifiques tout en omettant de décliner les valeurs de la marque en construisant des liens émotionnels avec les consommateurs ciblés », écrit-il.

L’universitaire donne seulement en exemple trois marques chinoises :

  • White Rabbit, une marque de bonbons de Shanghai. « Une de ses publicités les plus emblématiques dépeint une fille distribuant des bonbons à des personnes alignés dans une file d’attente devant un restaurant. Le slogan ? Quand elle est partagée, la douceur peut soulager l’anxiété. Pour He Jiaxun, cela fait écho à un thème récurrent utilisé dans les campagnes de marketing de Coca-Cola en Chine depuis des années et pourrait faire appel à certaines des valeurs universelles sous-jacentes aux cultures chinoise et occidentale. Il cite le psychologue Shalom H. Schwartz, selon lequel les êtres humains, quelle que soit leur nationalité, partagent 11 valeurs fondamentales comme la bienveillance, l’accomplissement et l’hédonisme.

 

  • la Buick de Shanghai General Motors, dont les publicités télévisées mettent en scène « la journée de travail typique et la vie familiale d’un aspirant col blanc. » Pour He Jiaxun, c’est un moyen efficace d’illustrer « la recherche d’excellence », un slogan que la marque a identifié comme sa valeur fondamentale à l’issue d’une étude de marché approfondie. « Les valeurs créées par une marque s’aligne avec les qualités recherchées par les clients ciblés par cette marque. »

 

  • Shang Xia, la marque de luxe appartenant au groupe Hermès et créée par la styliste chinoise Jiang Qionger. « Le nom ‘Shangxia’, qui signifie littéralement ‘de haut en bas’, fait allusion à un désir de servir de pont entre le passé et le présent de la Chine, entre l’Orient et l’Occident, l’art et la vie et l’homme et la nature. En résumé, quand les connotations de la marque et les symboles de la Chine sont en harmonie, des synergies peuvent se créer et bénéficier à l’entreprise », estime He Jiaxun.

De 2010 à 2016, l’universitaire a dirigé un groupe de chercheurs à la East China Normal University dans l’optique d’examiner comment 889 personnes interrogées au sein de 18 pays développés en Europe et en Amérique du Nord décriraient la Chine à l’aide de trois mots-clés.

Leaders charismatiques

« Il s’est avéré que les trois premiers mots renvoyaient à des traits typiques d’une culture orientale : ‘amical’, ‘historique’ et ‘traditionnel’. En revanche, les adjectifs tels que ‘innovant’, ‘entreprenant’ et ‘dynamique’ – plus souvent associés à l’Occident – étaient classés bien bas dans la liste », souligne-t-il. Avant de conclure : « quelle que soit leur volonté de projeter une image de puissance et d’innovation, les gestionnaires de marques ont encore tout intérêt à capitaliser sur les symboles historiques de la Chine. »

Alors quelle est la solution pour les marques technologiques chinoises dont la valeur ajoutée est précisément l’innovation ? He Jiaxun fournit des pistes : « une autre façon de véhiculer les valeurs de la marque est de marier les valeurs personnelles des chefs d’entreprise charismatiques à l’éthique des entreprises qu’ils fondent ou dirigent. » Pour lui, il existe une cohorte de leaders charismatiques en Chine, à l’instar de Jack Ma du groupe Alibaba ou Dong Mingzhu du fabricant d’appareils ménagers Gree. La liste ne comprend pas Lei Jun, le fondateur du groupe d’électronique Xiaomi, bien que la marque soit mise en évidence dans la photo d’ouverture de l’éditorial (ci-dessus).